7ème dimanche du Temps Ordinaire - Année C

Aimer ses ennemis : une utopie ?

Mission impossible ?
« Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent »… Mission impossible !
Il m’arrive parfois de regarder des émissions politiques à la télévision…
C’est souvent lamentable, ne trouvez-vous pas ? Les protagonistes n’arrêtent pas de se couper la parole.
Ils parlent tous en même temps… si bien qu’on ne comprend rien à leurs arguments.
Je me suis imaginé de leur lire l’évangile d’aujourd’hui : « souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent.
Priez pour ceux qui vous calomnient. A celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre joue.
A celui qui te prend ton manteau, ne lui refuse pas ta tunique… »
Si on lisait cela à nos politiciens d’aujourd’hui, comment réagiraient-ils ?
Et pour nous-mêmes… N’est-ce pas tout aussi difficile à accepter ? N’est-ce pas une « utopie » ?
Je crois vraiment que nous sommes dans l’un des passages les plus provocateurs de tous les évangiles.
Oui, c’est sans doute de la provocation. Et si c’est de la provocation, c’est donc pour nous faire réfléchir.
Je crois, en faits, que les paroles de Jésus nous mettent en garde contre le danger de l’escalade de la violence.
Le plus souvent, dans notre expérience humaine, lorsque l’on est blessé par quelqu’un, cela entraine une surenchère :
un esprit de revanche, un esprit de haine.
Comprenons bien : Lorsque, dans les béatitudes, comme la semaine dernière, Jésus proclame
« heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage »…
Lorsqu’il dit « heureux les doux », il ne dit pas « heureux les mous ».
En cas de conflit, Jésus ne nous demande pas de ne pas nous défendre. Mais il nous demande de ne pas entrer
dans l’escalade de la violence : de ne pas en surajouter ;
Lorsque l’on est victime d’une injustice, il ne s’agit pas de rester sans réagir. Mais notre réaction doit rester sereine :
car si nous sommes dans la vérité, c’est l’Esprit Saint qui parlera en notre bouche (Mt 10, 20).
Il ne s’agit pas d’être des mous : ce ne serait pas là, de la douceur évangélique, mais bien plutôt de la couardise,
de la peur, de la lâcheté. Etre mou c’est faire preuve d’un manque de courage.
Le chrétien doit avoir le courage de réagir lorsque des comportements déviants portent atteinte à la dignité humaine.
Vous le savez… je vous l’ai déjà dit sans doute, il y a un mot à la mode qui m’énerve au plus haut point :
ce mot, c’est le mot « tolérance ».
On a récemment mit la tolérance au sommet de toutes les vertus ! « Il faut être tolérant, hein, m’sieur l’curé ».
Au mot de tolérance, je préfère infiniment le mot de « respect ».
Car le respect de l’autre, même de celui avec qui je ne m’entends pas ou je ne m’entends plus…
Le respect de l’autre dans son intégrité physique, dans ses idées, et dans sa dignité, même si je ne suis
pas d’accord avec ses idées ou son comportement : Le respect de l’autre est un devoir absolu.
En revanche, « la tolérance » n’est pas une vertu chrétienne.
Car, dans notre monde, il y a des choses qui sont intolérables :
– Le mal est intolérable
– La haine et l’escalade de violence sont intolérables.
– Ce que font ou, au cours de l’histoire humaine chaotique, ce qu’ont fait les dictateurs de tous poils,
est intolérable.
– La pédophilie qui existe au sein même de notre Eglise catholique est intolérable.
– Les crimes contre l’humanité sont intolérables !
Pourtant, dans notre monde tel qu’il est : un monde soumis à la violence et aux conflits,
il nous faut toujours rester animés par l’Esprit du Christ : non pas l’esprit du monde, celui d’une
humanité abîmée par le péché, mais l’Esprit de Jésus : un Esprit de justice, d’amour et de
réconciliation.
Cet Esprit Saint vient, en quelque sorte sublimer notre nature humaine.
(cf 2ème lecture)
Alors, aimer ses ennemis ? Mission impossible ?
Oui : mission impossible, si nous en restons à l’état du premier homme, animé par l’argile :
convaincus que nous pouvons nous en sortir nous mêmes ; que nous pouvons nous en sortir tout seuls :
par nos propres forces.
Oui !… avec nos seules forces : aimer ses ennemis, c’est « mission impossible ».
Mais si nous nous en remettons à cet Esprit de Dieu, (L’esprit de Jésus, l’Esprit du Père) qui est plus fort que tout,
Alors tout est possible. Même ce qui est au dessus de nos forces.
L’Esprit Saint rend possible ce qui nous parait impossible.
Dans la lettre aux Galates, saint Paul nous dit ceci :
Voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi.
En ces domaines, la Loi n’intervient pas.
Ceux qui sont au Christ Jésus ont crucifié en eux la chair,
avec ses passions et ses convoitises.
Puisque l’Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l’Esprit. (Galates 5,22)
Père Do

+ Père Dominique Lemahieu, Curé

Marquette, dimanche 20 février 2022